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Après 62 ans d’indépendance monétaire, le franc guinéen jouerait-il encore le rôle d’une monnaie ?

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La rupture brutale des relations entre la France et la Guinée en 1958 dans le processus irréversible des indépendances africaines mettra la pression sur les nouvelles autorités souveraines du pays face aux énormes besoins de volonté des autorités françaises d’alors de tout mettre en œuvre pour que le pays fasse amende honorable. Ce qui fût d’entrer insupportable et prohibitif pour un jeune Etat sans expérience en la matière.

Juste après son accession à l’indépendance politique la Guinée fut confrontée à d’énormes difficultés dont entre autres :

  • L’enlèvement des archives importantes qui furent immédiatement expédiés à Dakar puis en France (cas des études effectués dans le domaine géographique et minier utiles pour le développement du pays) ;
  • L’arrêt des travaux d’équipement en cours de réalisation ou projeté : cas du barrage Konkouré dont le dossier technique fut confisqué ;
  • Gel des avoirs des guinéens en France (pensions des militaires et des civils, épargnes etc.) ;
  • La remise en cause de l’admission des marchandises guinéennes en France ;
  • L’arrêt des subventions d’équilibres de budget et des investissements FIDES ;
  • Le débarquement à Dakar de plus de plus de 80 professeurs (anciens et nouveaux) etc.

Malgré toutes ces mesures, la Guinée a négocié pour rester dans la zone franc, mais les autorités françaises ont passé outre. C’est  ainsi que la Guinée a opté pour l’indépendance monétaire en émettant sa monnaie nationale (le Franc Guinéen).

Du coup, cette émission est faite par la BRG (Banque de la République de Guinée) créée pour la circonstance en même temps que la monnaie nationale. La BRG se transformera en BCRG (Banque Centrale de la République de Guinée) à partir du 27 juillet 1961 par le Décret n°276/PRG/61. Après sa création, le Franc Guinéen s’est confronté à d’énormes contraintes (inondation du marché des faux billets par les français par exemple), de telle sorte qu’elle connaitra 5 reformes monétaires marquées par cinq familles de billets (changements de signes monétaires : instrument de politique monétaire utilisé par les autorités d’alors en plus des instruments traditionnels).

Après 62 ans d’indépendance monétaire, le Franc Guinéen ne joue plus la troisième fonction de toute monnaie qui n’est rien d’autre que la réserve de valeur.  Par ailleurs, de par cette fonction, la monnaie permet de reporter des achats dans le futur. Par exemple, dans une économie monétaire, un individu ayant vendu un bien X contre de la monnaie peut ne pas souhaiter dépenser cet argent immédiatement pour acquérir un autre bien Y. Ceci est possible parce que la monnaie est un instrument d’échange actuel mais aussi futur.

Cependant, nous convenons bien avec vous que la monnaie n’est pas le seul instrument capable de conserver de la valeur dans le temps. C’est pourquoi bon nombre d’agents économiques recourent le plus souvent aux titres financiers ou encore aux biens immobiliers contrairement aux autres actifs, la monnaie semble être le meilleur instrument de réserve de valeur parce qu’elle présente deux avantages : i) elle est parfaitement liquide (c’est-à-dire qu’elle est utilisable immédiatement en vue des transactions et sans coûts) ; ii) elle est sans risque alors que pour les actifs financiers par exemple, le détenteur court le risque d’une perte en capital à tout moment.

Tout ceci n’est possible qu’à condition qu’elle garde une valeur stable dans le temps. Or sa valeur dépend du Niveau Général des Prix (NGP). Par conséquent, si ce dernier augmente comme chez le cas aujourd’hui en Guinée, avec le même montant de monnaie vous pouvez acheter une quantité moindre de marchandises. La monnaie n’aura pas rempli dans ce cas, son rôle de réserve de valeur.

Sans abuser du temps du lecteur, nous pensons que pour restaurer la valeur externe de notre monnaie et d’assurer la troisième fonction de toute monnaie, la Banque Centrale devra à notre avis restructurer le marché de change de manière à autoriser dans le futur son intervention sur ledit marché en injectant de la devise quand le taux de change dévie de sa trajectoire par rapport au fixing (d’autant que notre régime de change actuel ne le permet pas) sans quoi, les agents économiques à l’image des cambistes agréés de la place auront toujours la possibilité de spéculer sur le Franc Guinéen.

A moyen et long terme l’on doit s’atteler à consolider à moyen et long terme notre excédent commercial depuis 2017, tiré essentiellement par les mines même si nous savons qu’il s’explique en grande partie également par la baisse des importations suite à la MALADIE.

De plus, il faudra résoudre le déficit majeur de la production du secteur non minier afin de répondre aux besoins de la population qui dépend des importations de biens et services. A cela, s’ajoutent l’absence de politiques de régulation des prix et d’une économie faiblement bancarisée (moins de 10% de la population détient un compte bancaire suivant les données statistiques que nous avons reçu des autorités compétentes) même si l’on soutient côté Banque Centrale que ce taux tournerait autour de 15%.

Dans le cas, où l’on ne parviendrait pas à respecter les conseils ci-dessus, la pression exercée par la demande de devises des agents économiques en contrepartie du Franc Guinéen fera toujours grimper le taux de change tout en affaiblissant la monnaie nationale dont l’offre est abondante.

De plus, la BCRG doit veiller au renforcement du contrôle des transactions en devises (origine et destination des fonds), continuer le transfert des soldes journaliers en devises des banques à la Direction de la Supervision Bancaire et aussi la possibilité d’instaurer une zone de sécurité pour la production et l’exportation de l’Or.

Enfin cette petite analyse non exhaustive montre que la résolution de l’épineux problème de change auquel est confronté notre pays passe essentiellement par la mise en place d’une véritable politique économique en général et une politique de change en particulier. Pour y arriver, il sera nécessaire d’impliquer de façon active toutes les institutions économique, monétaire et financière autour d’une réforme majeure dont l’objectif sera l’extraction de l’économie guinéenne des contraintes lourdes qui pèsent sur elle.

Safayiou DIALLO

  1. Economiste. 

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Les véritables obstacles au développement de la Guinée (…) sont ceux-là qui ne veulent pas la tenue d’élections libres, transparentes et inclusives.

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Les véritables obstacles au développement de la Guinée dans la cohésion sociale et la stabilité politique, sont ceux-là qui ne veulent pas la tenue d’élections libres, transparentes et inclusives.

Leur argument de manipulation consiste à dire que les politiques ont échoué. Si tel est le cas, les électeurs sont mieux placés pour l’exprimer librement avec leur bulletin au lieu de prétendre réfléchir à leur place.

Au nom de quoi peut-on faire croire que la possibilité de choisir, à travers le vote libre, est un problème ? Seuls ceux qui n’ont pas intérêt dans la transparence raisonnent ainsi. Évidemment leur position non avouée n’est rien d’autre que l’égoïsme et l’envie de garder les privilèges du pouvoir sans en avoir le droit et la légitimité.

Que faut-il faire pour y remédier définitivement ?

  • Créer un système indépendant et certifié qui garantit la transparence des scrutins électoraux.
  • Procéder à un recensement électoral de tous les guinéens en âge de voter. Cela partout où ils sont, au nom du droit naturel de chaque citoyen à participer à la prise de décisions publiques et au choix des dirigeants.
  • Réformer l’appareil judiciaire en y mettant des magistrats courageux, intègres et compétents pour dire le droit en toutes circonstances; quelles que soient la nature et l’origine des pressions.
  • S’assurer que les forces de défense et de sécurité respectent le choix électoral majoritaire pour déclarer leur loyauté au peuple à travers ses dirigeants correctement élus.

En fait, l’expérience de nos crises politico-sociales des 20 dernières années et l’impact des nouvelles technologies de l’information et de la communication sur les mentalités, ont démontré que désormais un dirigeant ne peut ni s’imposer ni être imposé aux Guinéens.

Ils peuvent vouloir garder le pouvoir par la violence, le lobying, la manipulation et la corruption. Mais ils n’auront ni la tranquillité d’esprit, ni la paix du cœur encore moins les honneurs. Et la finalité sera toujours la même.

Les guinéens conscients et ambitieux ont raison de refuser que des personnes non élues ou mal élues les gouvernent. Donc c’est leur droit le plus absolu de vouloir et se battre pour l’excellence et la représentativité.

Aliou BAH
Président du MoDeL

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“La seule source de légitimité de la junte militaire étant son engagement solennel, si elle décide de se renier, libre aux guinéens de la renier aussi.”

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En annonçant publiquement le glissement du calendrier de la transition au de-là de décembre 2024, le Premier ministre Amadou Oury Bah, qui a malheureusement choisi de jouer le rôle de porte-parole des décisions prises à son insu, a juste confirmé que le CNRD n’est pas fiable.

Ceci étant, un citoyen réfléchi et ambitieux doit-il se sentir obligé de se soumettre à une autorité qui ne respecte pas ses engagements ? Pourquoi accorder plus de temps à des personnes dont la mauvaise foi est si flagrante ?

Le CNRD s’est imposé par la force pour prendre le pouvoir. Il a élaboré unilatéralement la charte, le chronogramme et le délai de la transition. Rien de tous ces actes n’est le choix du peuple de Guinée. La seule source de légitimité de la junte militaire étant son engagement solennel, si elle décide de se renier, libre aux guinéens de la renier aussi.

Dommage que l’histoire politique de notre pays ne soit qu’une éternelle répétition. Il semble donc inévitable que cette fois-ci encore les mêmes causes produiront les mêmes effets.

Aliou BAH, Président du MoDeL

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Les incendies récurrents en Guinée : Comment renforcer la résilience des infrastructures critiques du pays ?

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Pour un pays, il est crucial de prioriser le renforcement de la résilience de ses infrastructures critiques afin d’assurer la sécurité et la protection de ses citoyens, de son économie et de sa souveraineté nationale.

Ces dernières années, on a observé une série d’incendies délibérés et répétés touchant de nombreux Guinéens dans leurs exploitations agricoles, sans qu’une enquête réussie puisse identifier les coupables de ces actes criminels.

Ces attaques sur les biens privés commencent à s’élargir depuis mars 2023 sur les infrastructures critiques et vitale de l’État. Ces actes visant à perturber ou détruire des installations essentielles ont un impact dévastateur sur la société et l’économie Guinéenne dans son ensemble.

Outre les centaines d’incendies d’origine humaine qui ont ravagé principalement les domaines agricoles en Basse-Guinée (Kindia, Forécariah, Boké…), quelques infrastructures essentielles de l’État ont également été la cible d’attaques depuis mars 2023 :

1- Le grand marché de Conakry Madina, la nuit du 03 mai 2024
2- Le grand marché de Conakry dabondi, avril 2023
3- La prison civile de coyah, juin 2023
4- La prison centrale de Conakry, novembre 2023
5- Le principal dépôt de carburant à Kaloum, Decembre 2023
6- La centrale thermique de Kaloum, avril 2024
7- Le pylône de Haute Tension à Manéah, mars 2024
8- Le marché central de N’Zérékoré, mars 2024
9- Le principal dépôt de la société électrique nationale EDG, avril 2024
10- Etc.

Ces événements entraînent des répercussions sérieuses et étendues sur le pays, affectant à la fois les aspects socio-économiques et sécuritaires tels que la déstabilisation sociale, le prolongement de la transition, les risques pour la sécurité nationale et les perturbations significatives dans l’économie.

La principale interrogation concerne l’identité ou les motivations des auteurs de ces attaques. S’agit-il de mobiles politiques, d’activités criminelles ou d’une stratégie de diversion ? Seule la justice et le temps permettront d’éclaircir cette question.

Il est essentiel d’identifier les diverses origines des incidents et des attaques ciblant nos infrastructures critiques afin de mettre en œuvre des mesures de sécurité adéquates pour prévenir et protéger contre de tels événements à l’avenir.

Cela débute par l’identification et la reconnaissance des infrastructures essentielles et vitales qui sont cruciales pour le bon fonctionnement de notre État, incluant notamment :

1- Les infrastructures des réseaux (Énergie, Télécommunications, Eau, Transports, Data centres, …)

2- Infrastructure sanitaire (Hôpitaux, centres de soins, laboratoires médicaux, centre d’hospitalisation épidémiologique et de pandémie…)

3- Infrastructure gouvernementale (Banques, systèmes de paiement, les institutions de maintien de l’ordre public, universités et centres de recherches, ports, camps militaire, bâtiments administratifs, centres de commandement et de contrôle, …)

4- Infrastructure alimentaire (entrepôts de stockage, usines et domaines agroalimentaires, les marchés, le réseaux de distribution… )

Ces infrastructures sont la base sur laquelle repose le bon fonctionnement de notre société. En se préparant efficacement aux menaces potentielles, en allouant des ressources aux dispositifs de sécurité appropriés et en établissant des plans d’urgence robustes, notre pays pourra se protéger contre les attaques et les situations de crise qui pourraient menacer sa stabilité et son progrès.

La protection de ces infrastructures critiques est cruciale pour assurer le fonctionnement stable et sûr de notre pays. Ainsi, plusieurs mesures doivent être prises par l’Etat Guinéen pour renforcer la sécurité de nos infrastructures telles que :

1- Identifier et classifier les infrastructures critiques et vitale dans toutes les régions du pays ;

2- Former et sensibiliser toutes les parties prenantes chargées de la gestion de ces infrastructures aux bonnes pratiques de sécurité et aux procédures d’urgence à suivre en cas d’incident ;

3- Mettre en place des systèmes de surveillance et de contrôle continu pour surveiller en permanence les infrastructures critiques et détecter toute anomalie ou activité suspecte ;

4- Adopter une législation et réglementation appropriée pour renforcer la sécurité, garantir l’accès, l’intégrité et la confidentialité des informations sensibles et punir tout incident contre les infrastructures critiques ;

5- Réaliser des évaluations régulières des risques pour identifier les menaces potentielles et les vulnérabilités de chaque infrastructure ;

6- Mettre en place des mesures de protection avancées pour prévenir les attaques sur les infrastructures (actes malveillant, cyberattaques…);

7- Disposer des équipes spécialisées pour gérer tout type d’incident sur les infrastructures critiques et vitales, coordonner les enquêtes et prendre des mesures correctives ;

8- Élaborer des plans détaillés de gestion d’urgence et de crise pour répondre efficacement aux menaces et aux incidents touchants chacune des infrastructures identifiées ;

9- Établir des partenariats et coopérer avec toutes les parties impliquées (services de renseignement, organismes de sécurité, secteur privé, …) afin de partager des informations et des bonnes pratiques en vue de coordonner les actions de sécurisation des infrastructures vitales.

En appliquant ces démarches de manière proactive et en collaboration, le gouvernement Guinéen pourra renforcer la résilience de ses infrastructures critiques, garantissant ainsi la sécurité de ses citoyens, de son économie et de sa souveraineté nationale. Cette approche aidera également à rétablir la confiance des citoyens envers les institutions du pays, ce qui est crucial pour assurer la sécurité, la sûreté et le bien-être de tous les Guinéens.

Mohamed Kourou Cissé

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