Ce 25 octobre 2025, un nouveau drame est venu endeuiller les populations vivant aux abords du barrage de Souapiti.
À Koba, dans le district de Tènè Kansa (sous-préfecture de Bangouyah), une pirogue a chaviré, coûtant la vie à
Amadou Sylla, 28 ans, fils de Fodé Sylla et de Djenaba Camara.
Originaire de Koba, ce jeune homme marié depuis cinq mois et sans enfant avait quitté les siens la veille,
commissionné par ses parents pour aller chercher les bagages issus de la récolte d’arachides de leur champ,
situé sur l’autre rive du lac. C’était le vendredi 24 octobre 2025, aux environs de 8h30. Il ne savait pas alors
qu’il effectuait le dernier voyage de sa vie.
C’est sur le chemin du retour que le drame s’est produit. Seul à bord de sa pirogue artisanale, il transportait ses
bagages lorsque l’embarcation a chaviré, selon le témoignage de M. Amadou Wondy Camara, président de la
jeunesse du district de Tènè Kansa. Ce n’est que le lendemain, samedi 25 octobre 2025, que son corps a été repêché
vers 9h dans les eaux du lac, d’après les témoins sur place.
Ce décès tragique porte à près d’une vingtaine le nombre de victimes recensées depuis la mise en eau du barrage.
Le lac artificiel, censé symboliser le progrès énergétique du pays, est devenu pour beaucoup un lieu de deuil et d’inquiétude.
Des drames à répétition et une colère grandissante
Depuis plusieurs années, les naufrages se multiplient sur le lac de Souapiti. Des pirogues de fortune, utilisées
quotidiennement par les habitants, chavirent régulièrement. Les causes sont connues : absence d’équipements de
sécurité, zones non balisées et absence de défrichage préalable avant la mise en eau.
« Ces manquements rendent la navigation extrêmement dangereuse et exposent les riverains à des risques permanents. »
— Alhassane Bah, secrétaire chargé des questions environnementales de l’Union des Impactés de Souapiti (UIS)
Face à cette hécatombe silencieuse, la colère monte. Alseny Diallo, secrétaire général de l’UIS,
dénonce une inaction coupable :
« Nous ne pouvons plus rester silencieux face à ces morts à répétition. Chaque noyade est une vie arrachée,
une famille brisée. Il est temps que l’État prenne ses responsabilités et garantisse la sécurité des populations autour du lac. »— Alseny Diallo, SG de l’UIS
Même indignation du côté du président de l’UIS, Conté Mouhamed Lamine, qui réclame des enquêtes sérieuses
sur chaque décès :
« Nous exigeons la vérité sur ces morts. Les populations ont été déplacées, dépossédées, et aujourd’hui elles meurent encore
faute de moyens de sécurité. L’État doit agir, et vite. »— Conté Mouhamed Lamine, président de l’UIS
Il a exprimé sa profonde tristesse et présenté ses condoléances, au nom de toute son équipe, à la famille endeuillée ainsi
qu’à l’ensemble des communautés impactées par le projet Souapiti, avant de conclure par une prière pour le repos de l’âme
du défunt, la voix tremblante et le visage marqué par l’émotion.
Des appels à la vigilance et à la coopération
M. Issiaga Soumah, secrétaire chargé du développement local, a rappelé la nécessité d’une prudence accrue :
« Le lac de Souapiti reste imprévisible. Il faut éviter les traversées dangereuses et renforcer la sensibilisation
dans toutes les zones riveraines. »— Issiaga Soumah
Son collègue, Hafiziou Barry, secrétaire aux affaires extérieures, insiste sur la responsabilité partagée :
« La sécurité autour du lac doit être collective. Les autorités, la société de gestion du barrage (SOGES) et les populations
doivent coopérer étroitement. Nous appelons à un dialogue permanent et à une écoute réelle des riverains. »— Hafiziou Barry
L’urgence d’agir : des mesures concrètes attendues
Les représentants de l’UIS exigent la mise en œuvre immédiate de mesures de sécurité, notamment :
- la fourniture d’équipements de flottaison et de secours adaptés ;
- la formation d’équipes de sauvetage locales ;
- le balisage des voies de traversée ;
- la surveillance permanente du lac.
Ils demandent également une indemnisation équitable des familles touchées et la création d’infrastructures de transport sécurisées
entre les localités riveraines.
La mort d’Amadou Sylla ne doit pas être un fait divers de plus.
Elle doit marquer un tournant — une prise de conscience nationale sur la nécessité d’allier progrès et sécurité,
développement et dignité humaine.
Tant que des mesures concrètes ne seront pas prises, les eaux de Souapiti continueront, hélas, d’emporter des vies.
