Entre devoir de justice et nécessité d’unité nationale
Par Abdourahamane Condé (Politologue)
La Guinée traverse aujourd’hui un moment charnière de son histoire politique. Après le référendum constitutionnel de septembre 2025 et à quelques mois de l’élection présidentielle fixée au 28 décembre 2025, le pays demeure fracturé entre méfiance, incertitude et fatigue sociale. Les grandes formations politiques peinent à participer à un débat national serein. Les voix citoyennes rappellent que la réconciliation nationale reste inachevée. C’est dans ce contexte que je m’interroge et propose des gestes politiques qui, selon moi, contribueraient à restaurer la confiance et ouvrir une voie vers une transition apaisée.
Une Guinée à la croisée des chemins
La situation politique appelle des décisions claires et des signes forts. Il ne s’agit pas ici de simples gestes symboliques mais de mesures concrètes susceptibles de réduire les tensions et d’ouvrir l’espace politique.
Si j’étais le Général, j’appellerais le Professeur Alpha Condé
L’histoire ne s’efface pas, elle s’assume. Consulter l’ancien président Alpha Condé permettrait d’inscrire la transition dans la continuité de l’Etat et de montrer que la République dépasse les rancunes. Un tel dialogue ne signifie pas une réhabilitation automatique mais une volonté de rassembler autour d’un projet national.
Si j’étais le Général, j’appellerais Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré
La démocratie est crédible lorsqu’elle inclut ses opposants. Associer Elhadj Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré à la préparation des élections contribuerait à garantir une compétition loyale et à diminuer le risque de boycott. Leur participation renforcera la légitimité du processus électoral.
Si j’étais le Général, je ferais tout pour retrouver Foniké Menguè, Billo Bah, Marouane Camara et tous les disparus
Rendre compte publiquement du sort des personnes disparues est un impératif moral et politique. Les familles et la société exigent des réponses. Organiser une enquête indépendante et transparente permettra de restaurer confiance et dignité et d’apaiser les tensions.
Si j’étais le Général, je réexaminerais les cas de Kassory, Damaro, Ibrahima Kourouma, et autres dignitaires détenus
La justice ne doit pas être un instrument de vengeance. Un réexamen public et impartial des dossiers des anciens dignitaires détenus, mené sous observation nationale et internationale, permettrait de vérifier la régularité des procédures et de rétablir la crédibilité du système judiciaire.
Si j’étais le Général, je gracierais Aliou Bah comme j’ai pardonné Païkoun Saré, King AGi et d’autres voix civiles
La grâce est un outil de réconciliation. Accorder des grâces conditionnelles à des acteurs civils et politiques favoriserait le retour au dialogue et la diminution de la polarisation. Ces mesures doivent être encadrées par des engagements clairs de non-violence et de participation républicaine.
Si j’étais le Général, je ferais le pari de l’inclusion
Construire un pacte national impliquant anciens présidents, opposants, leaders religieux, syndicats, jeunesse et société civile établirait un socle de règles communes. Un tel pacte clarifierait les règles du jeu et limiterait les tentations d’exclusion politique.
Si j’étais le Général, je miserais sur la mémoire et la réforme
Au-delà des gestes symboliques, il est indispensable d’engager des réformes institutionnelles. Renforcer l’indépendance de la justice, garantir la transparence électorale, protéger la liberté de la presse et instaurer des mécanismes de reddition de comptes. Ces réformes installeraient les bases d’un Etat durable.
Si j’étais le Général, je ferais le choix de l’histoire et non de la revanche
Le pouvoir transitoire doit viser la réparation et non la vengeance. Choisir l’histoire, c’est préférer la réconciliation, la justice et la construction d’institutions qui protègent tous les citoyens. Ainsi la Guinée aura une chance réelle de sortir du cycle des conflits.
Abdourahamane Condé (Politologue)