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Dédicace à mon grand-père Djibril Tamsir Niane(Par Alpha Amadou Diari Diallo).

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Hier matin, à mon réveil, j’ai appris à travers la presse en ligne, le décès du célèbre écrivain et historien Djibril Tamsir Niane.

Djbril Tamsir Niane, sommité intellectuelle internationale.

Djibril Tamsir Niane, homme déterminé, travailleur acharné et infatigable.

Ce témoignage, et cet hommage, je devrais le faire, et cela pour plusieurs raisons.

-Djibril Tamsir Niane, c’est cet auteur que j’ai étudié au collège, livres déposés sur les tables au cours de français, “Soundjata où l’épopée mandingue”, c’est son chef-d’œuvre.

Un livre qu’on nous “imposait” de lire, et qui etait susceptible de venir dans une dictée à la composition. Il fallait donc le maîtriser.

– Mais Djibril Tamsir Niane, c’est aussi mon grand-père. Sachez-le.
Lors des exposés en classe, sans modestie aucune, je me ventais d’etre son petit fils.
Impressionnant mes petits camarades qui, pour certains, n’hésitaient pas d’afficher un sourire moqueur, ne croyant pas un instant à mes propos.

Ce scepticisme, je le fis dégager, le jour où publiquement, alors que mes camarades m’avaient demandé de prouver qu’il était mon grand-père, montrer le livre qu’il m’avait dédicacé.
Le respect,sans bruit, hurlait en ma faveur.
Une dédicace que j’avais pu obtenir alors que j’étais aller saluer son adorable épouse, que nous ses petits-enfants, appelons affectueusement: Mama Niane.
Après avoir demandé gentiment une doléance à Mama Niane, de me présenter pour la première fois, le géant que l’Afrique, et le monde pleure aujourd’hui.
Cette dernière, avec gaieté, me montra le couloir qui menait à son bureau.
Tremblotant de peur, car ne sachant pas quoi lui dire, de peur de commettre des fautes en parlant, je voyais mes mains suer à grosses gouttes.
Le couloir qui n’etait pourtant pas très éloigné du salon, ne cessait de se rallonger, au fur et à mesure que je faisais un pas en avant.

Et voici l’inoubliable echange que j’eus avec le “baobab parlant”, une fois la porte de son bureau enjambée.

-Bonjour papa Niane. Je m’appelle Alpha Amadou Diallo, je suis collégien, et fils du neveu à votre femme.
Donc normalement vous êtes mon grand-père.
-Ah d’accord! comment tu vas jeune homme, j’espère que ton père se porte bien?
Alors que me vaut l’honneur de ta visite?
– Au fait j’ai étudié en classe votre livre “Soundjata où l’épopée Mandingue”. J’aimerai que vous me dedicaciez un exemplaire.
– Ah c’est très bien ça. Mais au delà de la lecture, tu peux demander à ton professeur de français, d’en faire une représentation théâtrale.
Malheureusement, je n’ai pas Soundjata avec moi. J’ai tout donné. Mais j’ai “Sikasso ou la dernière Citadelle” suivi de Chaka. Tu l’as lu?
– Non répondis-je.
– Alors laisse moi te le dédicacer.
Se leva le papy âgé, qui, stylo à la main, manipulait un ordinateur, et avait des feuilles posées sur son bureau.
En une fraction de seconde, il griffonnât avec élégance, sur la première page du livre ceci :

” A mon cher petit fils Alpha Amadou Diallo, bien affectivement.”

Une dédicace qui date du 06 janvier 2012.
Sourire aux lèvres, regard vif étincelant, il le posa entre mes mains.
Et moi très heureux, lui rendit un merci parfumé.
Un instant inoubliable et marquant, pour le jeune adolescent que j’étais.
Et comment terminer ce témoignage sans essuyer les larmes de ma très chère grand-mère: Maman Niane.

Une femme qui tout au long de leur compagnonnage, a fait preuve de bravoure, de courage, mais aussi et surtout de fidélité.
Couple heureux, papa Niane et maman Niane, étaient inséparables. Comme de petits-enfants qui venaient de s’amouracher, leur amour grandissait au fur et à mesure qui’ils vieillissaient.

Toutes mes pensées se tournent aujourd’hui vers elle. Elle qui, me confia un petit secret que je me fais le devoir de trahir pour la circonstance.
-Maman Niane, pourquoi vous accompagnez papa Niane dans tous ses déplacements, même à cet âge là. Vous vous aimez deh, ironisai-je.
Sa réponse est brusque, vivante et touchante.
-Ehhhhhh! je vais aimer papa Niane jusqu’à la mort.
Grande faucheuse, pourquoi les as-tu séparés?
Comment Maman Niane, va t-elle avec son âge vivre ce bouleversement dans sa vie, de “jeune mamy” toujours amoureuse?
Je ne trouve toujours pas de réponse à ces questions.
Peine perdue! Vous n’en trouverez pas non plus.
Mon légendaire papy, regrettez votre sejour terrestre, face à votre félicité céleste. Pour reprendre Mariama Ba dans une si longue lettre.
Ses ecrits, ses differentes reflexions sur le Mandingue qu’il maîtrisait, n’est ce pas une belle manière de dire à Maman Niane que son tendre epoux vit toujours?
En tout cas, il restera à jamais vivant dans les classes, les bibliothèques, et les cœurs, tombeaux des êtres chers.

Alpha Amadou Diari Diallo
Dedicace à mon grand-père Djibril Tamsir Niane.
Dédicace qu’il ne lira malheureusement pas.
Dakar le 09 mars 2021

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